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Burning Man : pas de spectateurs, que des participants !

13 juillet 20239 min read

Burning Man, festival ultime : une rencontre artistique solidaire de 8 jours fin août, dans un désert de poussière du Nevada aux Etats-UnisCette ville cosmopolite temporaire de 70 000 personnes, est une sorte de « Mad Max » dadaïste pour hippies dévergondés et en manque d’utopie, un remède plus efficace que dix ans de psychothérapie, à la recherche de soi-même. Si vous hésitez encore, le thème de l’édition 2023 invitera le participant à s’interroger sur l’animal et la relation de l’homme avec celui-ci.

S’il y a un festival où on ne peut improviser son séjour c’est bien celui-ci. La préparation pour un « virgin » est ardue, mais nécessaire pour appréhender le rite, le paradoxe est d’être bien prêt à lâcher prise. Le covoiturage est la meilleure option pour se rendre sur le lieu mais il faut prévoir la place pour apporter ses propres moyens de subsistance : eau, nourriture et abri contre les tempêtes de sable et le froid la nuit. Le but est d’être le plus indépendant possible et pour cause il n’y a pas de restauration, vous pourrez seulement acheter des cubes de glace et du café. Il faut ensuite trouver son « camp » parmi des centaines de collectifs à thème mettant en commun leurs ressources : du plus haut de gamme (50 000$ la semaine) à celui qui vous offre juste la douche pour 100$.

Un festival hors normes

Le festival est en 2 parties : la « playa » (la plaine désertique de Black Rock) et la cité avec un agencement des rues selon une grille semi-circulaire. On se repère facilement grâce à l’Homme (The man) qui se situe au centre d’un cadran d’horloge imaginaire où les rues rayonnantes sont désignées par leur position, par exemple 6h30. Il n’est pas rare de marcher 20km dans une journée d’où la nécessité d’avoir ramené sa propre bicyclette. Souvent les camps ont leur propre véhicule mutant ou « art-car » transformés avec une extrême créativité et souvent équipés d’un sound-system. On peut visiter Burning Man (BM) de manière aléatoire à leur bord, ils circulent lentement (8km/h) d’installations en monuments et créent des rassemblements là où ils jettent l’encre.

Installations monumentales dans le désert

Il est difficile de rester avec ses amis car des personnes excentriques dénudées ou déguisées vous donnent des hugs toutes les 10 minutes. En vous baladant dans ses 20km², vous pourrez aussi bien rencontrer une ménagère délirante du Midwest qu’un des patrons de start-up de la Silicon Valley ! Il mérite tous les superlatifs qu’on lui donne : à la fois extrême dans la beauté, la magie des rencontres, le surréalisme, la démesure, la contre-culture, l’amour, l’autonomie et l’humour. Les moments de solitude deviennent alors de magnifiques introspections et les paysages paraissent alors relever d’un autre monde.

On a l’impression d’être dans le plus majestueux musée sur terre. Les participants appelés « burners » déterminent la nature et la réussite de cette manifestation par leur expression personnelle (thèmes vestimentaires marqués d’une certaine forme de tribalisme) et leurs actions : activité artistique interactive, recherche de l’incongru et de l’inepte à travers les performances de type situationniste, le théâtre de rue, etc.

Un festivalier de Burning Man

La programmation musicale (principalement du dubstep) reste un mystère jusqu’à l’entrée sur le site, les artistes jouent gratuitement et il n’y a quasiment pas de têtes d’affiche. Une rumeur peut circuler « Daft Punk joue à telle adresse » pour indiquer une tente qui diffuse l’album ou au détour d’un camp on peut assister à un concert de Snoop Dogg que 100 millionnaires on fait venir.

Un état d’esprit ouvert

Il convient d’abattre toutes les barrières, aussi bien à l’intérieur de soi qu’entre les individus de la collectivité. Tout en respectant les autres, aidé par la sécurité omniprésente de 5 services d’ordre : ceux du BM, du parc naturel, de l’Etat, les gardes officiels et les rangers volontaires. Les organisateurs n’autorisent aucune transaction financière ou publicité, pour empêcher qu’un système de consommation vienne se substituer à l’expérience participative. Ils expliquent « qu’il appartient à chaque participant de décider comment il contribuera, ce qu’il entend donner à la communauté, et faire prendre corps au thème annuel à travers différentes formes de création ». Dix préceptes régissent la vie du festival, ils portent sur la morale individuelle et collective : l’inclusion solidaire radicale ; la pratique du don désintéressé ; l’affranchissement des lois du marché ; l’autosuffisance radicale ; l’expression de soi radicale ; l’effort en commun ; la responsabilité civique ; ne pas laisser de trace de son passage ; la participation ; le moment présent. BM vient d’acheter une propriété de 1600 hectares « Fly Ranch » pour tenter d’appliquer ce décalogue à l’année. 

Retour d’expérience

En 2009, je me rendais pour la première fois au BM pour y retourner en 2012, 2014 et 2018, de manière bien plus confortable. Mon dépucelage fut épique : nous avions loué à trois une berline, la poussière s’infiltrait partout inexorablement, même tente fermée, rendant notre sommeil impossible dans un nuage asphyxiant. Laissant tomber nos tentes, nous dormions à droite à gauche, et certains se sont retrouvés à faire l’amour sur le toit d’un autobus. Dans le camp écolo-fasciste que nous avions payé, il était impossible de ne pas participer à la vie collective.

J’étais résident (DJ Oof) dans un grand camion décoré en dragon qui embarquait une colonie de freaks avec leurs vélos. Voici une ballade typique : butiner sur une installation où vous avez l’impression d’être un excellent compositeur, juste en pianotant sur des rayons lasers – être invité à boire l’eau d’une bouteille où est inscrit votre vœu le plus cher (le Pr. Emoto a prouvé que l’intention change les molécules de l’eau) – rencontrer votre nouveau meilleur ami éphémère – entrer en communion avec un Oracle dans une chambre froide, etc.

Conference Jaïs Elalouf
Concert DJ Oof

Le festival se clôt par la crémation d’une effigie humaine de 50 mètres (The Man) et d’une apothéose émotionnelle avec l’incendie d’un grand « temple » faisant référence à l’inspiration du BM de la fin des années 70 : des rassemblements sur les plages de San Francisco où l’on faisait des bûchers de solstice, mélange de fête païenne punk et de Feu de la Saint-Jean. 

Jaïs Fred Elalouf

#burningmanfestival  #siliconvalley  #contreculture

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